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Bientraitance institutionnelle : un devoir individuel et collectif

bientraitance institutionnelleLa bientraitance, on en parle depuis 20 ans dans les institutions de prise en charge. Même si des professionnels sont vigilants, les moyens nécessaires sont manquants. Baisse de budget, manque de personnel, irresponsabilité et finalement l’indifférence de la société : bien des facteurs qui ne favorisent pas la bientraitance des personnes vulnérables.

La bientraitance est évoquée pour la première fois dans les années 90 en France. A l’époque le terme concerne les pouponnières, on cherche à y rendre plus humain l’accueil de très jeunes enfants. Très vite, d’autres professionnels de la prise en charge se sont appropriés le terme et l’engagement éthique qui va avec.

le bien du malade ne peut être exclusivement réduit aux soins

Si la médecine traite des différentes pathologies, on retrouve dans la bien-traitance un engagement éthique avec le terme « bien », marquant qu’il s’agit certes d’apporter des soins, un traitement, mais sans s’y restreindre. On retrouve l’idée que le bien du malade ne peut être exclusivement réduit aux soins.

apporter à la personne un maximum de bien-être

Depuis sa création, le terme de bientraitance s’est enrichi de diverses réflexions. S’il était possible de faire une synthèse de ces apports, nous dirions qu’ils tournent la bientraitance vers le souci de l’autre dans sa singularité. Ils en font une démarche qui tend à apporter à la personne un maximum de bien-être en s’adaptant à chaque situation particulière.

bientraitance institutionnelle

Alors, on est en droit de croire que depuis tout ce temps des progrès significatifs ont été réalisés. Cette affirmation ne peut se vérifier que trop partiellement, les moyens humains et financiers pour y parvenir font défaut. Depuis quelques années, on assiste même à une dégradation de la situation dans les institutions.

Comment être bien-traitant ?

bientraitance institutionnelleLa bientraitance est un joli mot qui a un certain attrait. Beaucoup de professionnels se le sont approprié pour en faire une composante majeure dans la relation de soins et d’accompagnement. Mais le passage de l’idée de bien-traiter à l’action d’être bien-traitant n’est pas automatique.

Oui, la prise de conscience individuelle est un bon point de départ vers une relation bien-traitante. Non, la seule bonne volonté ne suffit pas pour y parvenir. Plusieurs facteurs doivent permettre aux professionnels de se maintenir dans un engagement bienveillant. Quand l’un d’eux ou plusieurs sont manquants ou défaillants, très vite la bientraitance perd sa place dans la relation.

Un questionnement collectif et individuel

Il incombe aux équipes pluridisciplinaires de faire en sorte que la notion de bientraitance soit un débat constant dans l’institution. Des temps de réunion, de réflexion et de synthèse doivent être créés. Les chefs de services et cadres dirigeants ont ce devoir de faire vivre l’objectif d’une institution bienveillante.

Chaque encadrant, mais aussi l’ensemble des personnels techniques et administratifs ont un devoir de posture professionnelle respectueuse de la personne, envers les usagers comme les collègues.

Rester bien-traitant en toute circonstance est un objectif, une ligne de conduite. Y parvenir est un sacré challenge. Cela demande une réflexion continue qui n’est rendue possible que par une posture volontariste marquée. C’est un engagement pour le long terme et dans chaque moment de l’accompagnement, du soin ou de la prise en charge de la personne.

bientraitance institutionnelle

La bientraitance doit s’appliquer à tous

On voit beaucoup d’institutions afficher leur volonté d’œuvrer à l’amélioration des conditions de vie des usagers de leur établissement. Bien. Mais on voit ces mêmes institutions adopter des techniques de management emprunter aux entreprises à but lucratif.

Les conséquences sont dramatiques, les conditions de travail des employés se dégradent considérablement. Le stress au travail dans les institutions atteint des niveaux record. Le manque de personnel est quasi systématique. Alors dans ces conditions, la bientraitance de l’usager par un professionnel exténué n’est tout simplement pas possible.

Une institution bienveillante doit prendre soin de son personnel également. La notion de bientraitance traduit des valeurs éthiques universelles et globales. D’autre part, on doit permettre aux professionnels d’être dans des conditions favorables à une relation bien-traitante, sinon :

Exiger de son personnel une posture irréprochable, sans lui donner les moyens d’y parvenir est une imposture.

Le cadre de l’intervention professionnelle

Des loi récentes sont venues poser le cadre dans lequel les institutions doivent construire leur proposition de prise en charge de la personne.

  1. la loi de 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale
  2. la loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées
  3. la loi de 2007 réformant la protection de l’enfance.

Des outils de suivi et de contrôle comme l’évaluation externe du niveau de service rendu sont en cours de déploiement dans tous les établissements concernés.

Qui est responsable ?

Nous sommes tous responsables de ce qui se déroule sous nos yeux ou à notre porte.

  • Les parents et les encadrants doivent travailler ensemble à la mise en place d’une prise en charge cohérente et bien-traitante.
  • Les responsables politiques ne peuvent se dédouaner de toute responsabilité maintenant que les lois sont votées. Il doivent créer les conditions nécessaires à la mise en oeuvre effective de la loi.
  • Les financeurs doivent mettre un terme aux baisses budgétaires qui entraînent la diminution du nombre d’encadrants et une baisse du niveau moyen de qualification des employés recrutés.
  • Les institutions de contrôle sanitaire et judiciaire doivent remplir leur rôle, et garantir un niveau et une qualité de service équivalent à chaque citoyen qu’il soit ou non une personne vulnérable.
  • La société française dans son ensemble, chaque individu est responsable d’accepter ou non le modèle de société qui est le sien. Ne rien dire revient à accepter.

Si Albert camus disait :

Nous ne pouvons juger du degré de civilisation d’une nation qu’en visitant ses prisons

On peut aussi écrire :

Nous ne pouvons juger du niveau d’humanité d’une société qu’au regard de la considération qu’elle porte aux plus vulnérables de ses citoyens

Pour aller plus loin, visitez : Bientraitance le blog des bonnes pratiques

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3 commentaires
  1. PHILIPPE dit

    je suis infirmiere en maison de retraite depuis 3 ans , au paravent j’ai travaillé en service de chirurgie/oncologie puis j’ai passé 4 ans en libéral en ville et a la campagne.
    L’établissement dans lequel je travaille aujourd’hui est a la campagne, éloigné de 30 kilomètres de villes moyennes.
    Nous avons 54 résidents, répartis sur 3 étages, dans un établissement réhabilité et étendu il y a 6 ans.

    Il est à noter une incohérence quasi complète dans l’architecture, l’agencement, et la gestion des espaces. Ces erreurs de conceptions sont aujourd’hui irréparables est sont la cause de beaucoup de fatigue et contraintes réelles, quotidiennes, tant pour les résidents que pour le personnel.
    exemple ; un hall d’accueil minuscule ou tous les résidents veulent stationner, un seul ascenseur, des portes dans les chambres dont l’ouverture interdit le circulation, une salle de restauration exigüe avec énorme poteau plein milieu, des espaces verts nécessitants un accès par un escalier, des toilettes communes ne comprenant qu’un seul accès handicapé, comment cela est-il possible ?

    Interviennent auprès des résidents ; une infirmière, des aides-soignants et des agents de services hospitaliers.
    Les infirmières ont suivis un cursus de 3.5 années de formation, les aides soignantes 1 année et les ash n’ont aucune formation.
    Face au manque de personnel, due à l’éloignement géographique, aux arrêts de travail à répétition, au nombres d’agents décidé par l’administration de santé, les aides soignants et agents hospitaliers sont amenés à prendre en charge des résidents comme des infirmière, a quelques actes prêt. Elles (car majoritairement la population est féminine , voir aussi le lourd rôle de la femme dans la vie de famille) agissent avec beaucoup de bonne volonté, mais il faut regardé les choses en face, le choix de ces métiers ne sont pas volontaire mais sont la résultante d’une pénurie d’emplois.
    Alors l’état accepte d’employer des personnes sans qualification et leur demande d’agir auprès des personnes âgées comme des professionnelles, du jour au lendemain, bien évidement le salaire est au plancher.
    Les plannings de travail sont établis au fur et a mesure en fonction du manque de personnel – donc impossible deux mois a l’avance de savoir comment vous travaillerez, impossible de poser plus de 15 jours de vacances l’été – travail 1 week-end sur 2, voir 2 d’affilés.

    Sur les 54 résidents,
    24 relèvent de pathologies engageant une déficience cognitive ou psychiatrique très sévère. (si l’ont inclus les sévérités intermédiaires, c’est 86% de la population dont il faut parler)
    15 sont dans une incapacité totale ou très sévère de mobilité (tant le bas que le haut du corps).

    Nous n’utilisons plus l’appellation maison de retraite mais bel et bien établissement d’hébergement pour personne âgées dépendantes, il serait plus juste de nommer, établissement d’hébergement géronto-psychiatrique.

    Il est démontré que les pathologies de type Alzheimer, Parkinson ou autres dégénérescences cérébrales, peuvent être ralenties (non guéries) par des prises en charges personnelles et individuelles ;
    nous en sommes incapables par manque de moyen.

    Donc nous assistons de notre mieux de personnes âgées dans une phase de leur vie qu’ils n’auraient jamais imaginé vivre.

    Le prix de séjour est d’approximativement 2000 euros
    une infirmière après 20 ans d’expérience est à 2200 euros de salaire net,
    une aide soignante après 20 ans d’expérience est à 1700 euros de salaire.
    Je vous laisse imaginer les débutants –

    Parfois nous avons des gens qui viennent nous administrer des formations avec le mot qui tue ; mal traitance , et qui démontrent par de grandes emphases comment faire pour être meilleurs, devant nos yeux ébahis, ils nous démontrent comment nous y prendre pour une toilette en 30 voir 40 minutes… quel agent dans son quotidien dispose d’autant de temps ? chez nous aucun.

    Les toilettes c’est une chose mais après une fois que tout le monde est habillé, propre, que se passe-t-il pour nos résidents ?
    ils attendent entassées dans le hall les moments des repas, et ils peuvent pour les plus valides, participer à des animations.

    Et l’on nous annonce doucement un age de départ à la retraite qui s’éloigne vers les 65 70 ans ! qui soignera qui ?

    Nous faisons sincèrement de notre mieux, nos équipes sont de très bonne volonté mais voila nous le savons la volonté ne fait pas tout.

  2. Santé nature innovation dit

    L’approche est tout à fait parfaite ! merci de nous éveiller à travers vos écrits

    1. Fabrice Renault dit

      merci, puisse-t-il y avoir de nombreuses personnes ayant votre sensibilité

Les commentaires sont fermés.

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