Des milliers d’emplois pour une agriculture sans pesticides

L’agriculture sans pesticides est une promesse d’avenir et d’espoir. Elle permettra la création de dizaines de milliers d’emplois pour nourrir la France sans produits chimiques, et sans l’aide des machines agricoles. La rentabilité financière est également au rendez-vous de ce pari idéologique devenu réalité, qui ne demande plus qu’à se généraliser pour le bien de tous.

Des milliers d’emplois pour une agriculture sans pesticides

C’est près de Rouen, à la Ferme du Bec Hellouin, que s’invente l’agriculture sans pesticides, l’agriculture de demain. Expérimentant des techniques qui viennent des quatre coins de la planète, cette ferme en permaculture produirait autant, voire plus que le système conventionnel.

L’exploitation pose les bases d’un nouveau modèle agricole : celui d’un réseau de centaines de milliers de micro-fermes rentables et capables de générer chacune un emploi à plein temps.

Nous sommes ici sur une petite île de la ferme du Bec Hellouin, chez Perrine et Charles Hervé-Gruyer  à une cinquantaine de kilomètres de Rouen, dans l’Eure. Les canards – des Coureurs indiens qui ne mangent pas les cultures – barbotent et viennent, quand c’est nécessaire, happer les limaces qui menacent les plantations. Sur le côté poussent des roseaux. Une fois broyés, ils serviront de paillage aux jardins afin d’empêcher les mauvaises herbes de pousser. En jeunes pousses, ils seront vendus à un restaurant parisien !

Un peu plus loin, des arbres et arbustes fruitiers mélangés à des plantes aromatiques et médicinales abritées des vents dominants. L’instigateur de l’endroit explique :

Nous avons créé des petits milieux qui interagissent entre eux, avec une circulation de la matière organique (…) un cocon de nature vivante, protégée.

Au total, entre les cultures maraîchères, la forêt jardin, les mares, les pâtures, les terrasses cultivées et le verger, la ferme du Bec Hellouin s’étend aujourd’hui sur 20 hectares.

Sur son île, Charles Hervé-Gruyer ressemble un peu à un aventurier de l’alimentation de demain. Après avoir parcouru le monde sur un bateau école, il a accosté ici, au Bec Hellouin, un petit coin de terre où nourrir sainement ses enfants.

Une production en permaculture abondante, variée et rentable

Près de deux hectares d’herbage au sol, au départ peu fertile, où poussent désormais en abondance, près de 1 000 variétés de végétaux, fruits, légumes et plantes aromatiques. Dix ans plus tard, l’endroit est devenu une ferme de référence pour les adeptes de la permaculture, la culture permanente.

Toutes les semaines, 65 paniers de légumes issus de 2 000 m2 dédiés au maraîchage vont régaler les habitants du coin, de la région de Rouen et de Paris. Une autre partie est vendue à un grossiste, qui alimente ensuite un magasin Biocoop. Un restaurant parisien étoilé s’y approvisionne également. A la ferme, un chef cuisinier prépare confitures ou sauces qui sont ensuite vendues sur place.

Des plantations complémentaires

A la fin avril, quatre rotations de culture ont déjà été effectuées depuis le début de l’année. Sous la serre, petits pois, salades et carottes poussent à foison. Les fèves qui grandissent viennent capter l’azote pour alimenter les salades, qui s’étendent au sol et évitent ainsi l’apparition de mauvaises herbes.

A la ferme du Bec Hellouin, toutes les cultures sont associées : pas de rangs séparés de carottes, pommes de terre et salades. Mais plusieurs variétés de légumes aux besoins nutritifs différents, plantés à proximité, et qui s’alimentent mutuellement.

Dehors, des légumes précoces poussent sur une butte dite « chaude », agrémentée de fumier de cheval. Ce dernier se composte directement sur la butte, et permet ainsi de gagner quelques degrés sur la fin du froid hivernal.

Une ferme à la pointe de la permaculture

«On s’inspire de la nature pour nos installations humaines, explique Charles Hervé-Gruyer : les déchets de l’un font les ressources de l’autre.»

C’est pourquoi le positionnement des cultures et des éléments, les uns par rapport aux autres, est primordial. L’objectif de la permaculture est de recréer la grande diversité et l’interdépendance présentes naturellement dans les écosystèmes.

Nous prenons un soin extrême des sols, afin qu’ils soient de plus en plus vivants, fertiles, indique Charles. Les buttes permanentes, où la terre n’est jamais retournée mais continuellement enrichie, se rapprochent de la nature, car il n’y a pas d’engins qui viennent travailler ici.

Pas d’engin agricole = pas de pétrole

A la ferme du Bec Hellouin, un tracteur n’est utilisé que pour le transport du fumier, qui vient du club hippique voisin

Au départ, un cheval aidait à retourner la terre. Jusqu’à ce que se développent les buttes permanentes, qui n’ont plus besoin d’être retournées.

Pour Charles qui se déplace dans ses jardins sa brouette atelier, avec l’ensemble des outils dont il a besoin au quotidien :

La permaculture prévoit ce monde inédit, sans pétrole

La permaculture est aussi et surtout une agriculture de la connaissance, qui n’a rien à voir avec l’agriculture conventionnelle actuelle :

Avec l’agriculture moderne, vous recevez un mail de la chambre de l’agriculture qui vous dit : il y a telle invasion d’insectes, voici le produit que vous pouvez mettre. A vous de jouer !

Dans certaines situations critiques, ces « conseils » de la chambre de l’agriculture se transforment en injonctions préfectorales…à

Permaculture : produire durablement

L’agriculture menée au Bec Hellouin utilise très peu de pétrole. Loin derrière l’agriculture conventionnelle, et même de l’agriculture biologique :

Dans l’agriculture conventionnelle, pour produire une calorie d’alimentation, il faut 10 à 12 calories d’énergie fossile, explique Charles. Le bio tente d’utiliser le moins possible d’engrais de synthèse mais nécessite beaucoup d’engins dans les champs.

Moins de pétrole, donc plus de travail à la main, minutieux, pour garantir sur le long terme une extraordinaire biodiversité des sols :

L’agriculture moderne cherche à atteindre une rentabilité à court-terme, en brûlant les réserves carbonifères. Nous, nous prenons notre temps. Le but de mon travail est que mes enfants puissent en profiter durablement.

(suite de l’article en page 2)

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