Le cannabis thérapeutique en plein développement

L’usage du cannabis thérapeutique est une réalité dans plusieurs pays européens tout comme dans certains états américains. Chez nous, il est prescrit très exceptionnellement. La France entretient un tabou tenace et associe toujours le produit aux drogues illicites, quand chercheurs et médecins s’accordent – enfin – à lui reconnaître des vertus médicales intéressantes.

En France, quand on parle cannabis, on associe rapidement le mot à la drogue, les joints, et l’interdiction faite par la loi. Pourtant, cette substance possède aussi des vertus médicales pour les patients atteints de douleurs chroniques, de spasmes liés à une sclérose en plaques, de nausées ou d’un manque d’appétit dû au sida ou à un cancer. La liste n’est pas exhaustive. Plusieurs centaines d’études sur le sujet l’ont déjà confirmé, d’autres étudient actuellement des domaines d’application encore inexpérimentés avec des premiers résultats prometteurs.

L’Association Internationale pour le Cannabis Médical a dressé une liste des études et observations réalisées sur le cannabis, consultable ici.

Ces propriétés médicales sont de plus en plus reconnues de par le monde mais encore très rarement en France. Tout porte à croire que des intérêts sont privilégiés avant même celui des malades. Car le chanvre indien est consommé comme plante médicinale depuis l’Egypte ancienne. Toutes les sociétés l’ont utilisé, y compris la nôtre jusqu’en 1950, date de sa prohibition. La recherche était au point mort depuis cette période, jusqu’à ce qu’une découverte capitale relance l’intérêt des chercheurs…

Le corps fabrique son propre neurotransmetteur cannabinoïde : l’anandamine


Ce n’est finalement qu’en 1992 que l’intérêt pour le cannabis thérapeutique allait rebondir avec les travaux du Professeur Raphael Mechoulam. Il découvre qu’un analogue du cannabis est fabriqué par l’organisme lui-même : c’est l’anandamide.

Selon ce professeur de l’Université de Jérusalem, le système des endocannabinoïdes joue un rôle dans pratiquement tous les systèmes physiologiques qui ont été observés. Il n’a pas tardé à susciter l’intérêt de la profession, l’emballement des recherches autour de ce composé en atteste.

D’ors et déjà, on sait que le cannabis est efficace de façon significative pour plusieurs pathologies, on ne conteste plus certaines de ses propriétés :

  • Antidouleur –  surtout utilisé pour les douleurs chroniques persistantes
  • Anti-spasmodique – utilisé pour les cas de sclérose en plaques et même pour des cas d’ épilepsie partielle
  • Anti-vomitif – utilisé contre les nausées , pour les patients sous chimiothérapie ou atteints par le SIDA
  • Stimulateur de l’appétit – utile pour les cas de maigreur maladive, de dénutrition importante chez des personnes âgées en long séjour, de patients atteints d’Alzheimer ou par le SIDA
  • Améliore le sommeil
  • Dilatateur des vaisseaux  – pouvant améliorer le glaucome

L’impact du cannabis sur des maladies graves est à l’étude


D’autres pistes intéressantes voient le jour avec la réalisation de nouvelles études scientifiques. Il y aurait une efficacité possible du cannabis pour contrer la croissance de certaines tumeurs au cerveau, face à la progression de la maladie d’ Alzheimer, pour aider au traitement des Troubles Obsessionnels Compulsifs, et aussi les tics excessifs ou pathologiques du syndrome de Gilles de la Tourette.

La recherche continue aujourd’hui d’explorer les dysfonctionnements du système endocannabinoïde afin d’identifier d’autres rôles positifs éventuels du cannabis médical.

Selon le Pr Mechoulam, les médicaments de demain à base de cannabis seront sans doute liés à la neuroprotection ou encore  à la douleur chronique. Son équipe a également synthétisé un dérivé du chanvre a priori « très efficace pour les troubles digestifs » et travaille sur des dérivés utilisables en cas de rhumatismes inflammatoires chroniques ou de cancer.

Qu’il soit utilisé en complément des thérapeutiques, pour gérer les effets secondaires, ou en alternative à d’autres traitements ; le cannabis médical a des bénéfices connus et reconnus. Il est ainsi prescrit dans certains pays sous conditions, notamment pour sa forme d’utilisation.

Sous quelle forme utiliser le cannabis thérapeutique ?


Quand il est fumé le cannabis augmente le risque de cancer tout comme le tabac et même plus encore. Différentes études l’on mis en évidence. Il est incontestable aujourd’hui que fumer un « joint » est plus néfaste que bénéfique. Dans le cadre de l’usage médical, il est donc recommandé, dans les pays qui l’autorisent, de consommer le cannabis sous différentes formes non fumées.

Au Pays-Bas, l’Office pour le Cannabis Médical recommande la consommation de cannabis thérapeutique sous forme de tisanes ou en utilisant des vaporisateurs, dispositifs qui permettent d’inhaler le principe actif du cannabis sous forme de vapeur, sans le brûler ni produire de résidus cancérigène.

Un spray buccal fait à base d’extraits de cannabis, le Sativex®, est également accessible en pharmacie au Canada depuis 2005 en cas de pathologie neurologique grave (sclérose en plaques par exemple).

Il existe aussi deux médicaments à base de THC (tétrahydrocannabinol, principe actif du cannabis) de synthèse aux Etats-Unis et au Canada, le Cesamet ® et le Marinol ®. Les patients anglo-saxons prenant du cannabis médical sont en général porteurs d’une « Medical Necessity Card », qui leur permet de justifier de leur bonne foi.

En France, une autorisation du cannabis limitée


vendu en pharmacie jusqu’en 1950

Depuis 1950, le chanvre a été retiré de la pharmacopée mondiale dans un contexte de prohibition internationale de son usage récréatif. Depuis, les chercheurs redécouvrent progressivement son usage médical.

Cette tendance se traduit par le retour du cannabis thérapeutique en Californie dès 1995, puis ensuite dans une douzaine d’états américains et au Canada. Du côté de l’Europe, les Pays-Bas ont créé en 2003 un Bureau du cannabis médical qui supervise la culture et la vente en pharmacie de cannabis aux patients. Ce cannabis réservé aux pharmacies est aujourd’hui également disponible en Allemagne, en Italie et en Finlande. L’Angleterre, l’Australie, la Nouvelle Zélande, la Belgique ou encore la Suisse autorisent aussi la prescription et la délivrance de dérivés du cannabis.

En France, le Marinol ® est le seul dérivé cannabinoïde utilisé, mais uniquement par l’intermédiaire d’une procédure particulière (une Autorisation Temporaire d’Utilisation nominative), qui est rarement connue et encore plus rarement utilisée par les médecins. Seuls quelques dizaines de patients y ont eu accès depuis 2001, alors que les bénéficiaires potentiels se compteraient par milliers !

Directement liée au problème du cannabis récréatif, la situation nationale du cannabis thérapeutique n’est pas sans rappeler celle de la morphine. Jusque dans les années 90 en France, cet opiacé dérivé du pavot aux propriétés connues depuis le 19e siècle était boudé par les professionnels de santé en raison de sa proximité avec des drogues prohibées, l’héroïne et l’opium… alors qu’il était largement utilisé chez nos voisins.

Les mentalités évoluent, la recherche progresse. On peut penser qu’indépendamment de la répression de son utilisation à des fins récréatives, l’usage du cannabis médical sera amené à se développer en France. La multiplication récente d’études, de témoignages de soignants et de patients confirmant son intérêt dans certaines indications devrait accélérer ce processus.

Toutefois, les réticences sont encore fortes. A n’en pas douter, ceux dont les intérêts financiers sont en jeu mettront tout en œuvre pour contrer le développement de ce qui pourrait bien devenir un jour un traitement médical à part entière.

Source : Tout savoir sur le cannabis médical,  paru sur doctissimo.fr

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